Après un séjour très agréable à Asunción et la rencontre de Tania, Stéphane et Aydan, on se fait déposer comme des pachas à l’arrêt de Bus pour rejoindre Filadelfia, à mi-chemin entre Asunción et la frontière Bolivienne. On a 10 minutes d’avance, on a à manger, des petites cartes postales à écrire durant les 6 heures de trajet. Le gars du quai a contrôlé nos tickets, il y a plus qu’à attendre le bus sur le quai qu’il nous a indiqué. En attendant, on se rachète à boire tout en demandant régulièrement aux gens si notre bus n’est pas arrivé, car il y a un bon va et vient des bus ici pour toutes les directions. Puis, à un moment on se dit que le bus a du retard quand même, chose qui n’est pas habituel en Amérique du sud pour nous. Aude demande au gars quand est-ce que le bus va arriver et lui de répondre avec une nonchalance et aplomb, en restant assis face à nous le cul posé sur sa chaise, clope à la main, “le bus est déjà parti“… Pardon mon petit José, mais là on a du mal se comprendre! Le gars dit que c’est notre problème, qu’il fallait que l’on soit attentifs. Ce à quoi Aude lui répond que l’on a fait que ça, du coup par énervement je lui demande, dans un espagnol absolument pas correct si sa cigarette est bonne et s’il était bien installé dans son fauteuil à nous regarder. Aude n’est pas contente du tout et dit au gars de se démerder avec son téléphone pour rattraper le coup pendant qu’elle va au bureau, histoire que l’on ne perde pas de temps (ni notre argent parce qu‘il paraît qu‘en prime, on a perdu le prix du billet dans l‘affaire… NDLD). Pendant ce temps le gars, qui sent bien qu’il a fait une boulette, m’explique qu’ici c’est pas l’Europe et qu’on avait juste à demander. Du coup je lui redis comme Aude, qu’on fait que ça et que si ici c’est pas l’Europe et bien il a validé nos tickets et son boulot c’est juste de regarder que tout le monde est bien monté! Nous voila obligés de prendre un taxi pour rattraper le bus qui s’est arrêté. On négocie alors un tarif de taxi avec la compagnie, histoire de pas faire les blaireaux de touristes. Finalement, le taxi rattrape le bus mais, comme convenu, on ne paie pas l’intégralité de la course. On monte dans le bus à la va vite, bien que Aude réexplique au chauffeur volé le deal avec la compagnie, laissant le pauvre taximan avec un impayé, puisque le chauffeur de bus l’enverra balader, lui et sa réclamation. Dans cette histoire, c’est le taximan qui se fait avoir, mais pour le principe je ne peux pas laisser les autres ne pas prendre leurs responsabilités, l’erreur est partagée et ce n’est pas une raison pour que nous soyons pris pour des abrutis de touristes. Mais c’est vraiment pas cool pour le taxi. En même temps, ici, c’est tous les jours comme ça et durant tout le voyage, on fait en sorte de ne pas avoir ce raisonnement là, mais pour une fois…
Le trajet de bus est pas trop mal, les paysages étant assez plats, secs et poussiéreux. Nous ferons la connaissance de petites filles issues des tribus locales dans le bus, avec lesquelles on s’amusera à jouer, par des petits jeux de magies, de mains et des sourires.
On arrive finalement à Filadelfia, alors qu’il fait déjà nuit (en effet, ici la nuit arrive vers 18h30). Après plusieurs allers-retours, on trouve finalement de quoi dormir, car c’est la semaine sainte et les gens sont en vacances!!
Filadelfia est traversée par une rue centrale goudronnée, d’où partent des pistes perpendiculaires, dont l’issue reste vague. Dans cette ville aux noms de rue bizarre (calle Edinburg??), la communauté allemande est présente sous la dénomination de Mennonites, qui sont les exploitants farmers du coin, un peu à la Charles Hingals. En se renseignant un peu, on apprend que ces Mennonites forment une communauté de pas moins de 15 000 personnes dans le Chaco, face à seulement 30 000 indigènes. Ils sont donc un peu comme à la maison! Issus à la base de l’immigration Ukrainienne, réfugiés de l’Union Soviétique, les Mennonites fondent en 1927 la première “Mennonit colony” puis en 1930 “Ferheim”, connue aujourd’hui sous le nom de Filadelfia. Appliquant leurs propres règles, les Mennonites sont aussi connus pour être de bons propriétaires terriens. Comprenez que leur réputation est d’être gentils et tolérants avec les populations locales qu’ils font travailler sur… leurs terres. Les terres de qui? Ah le voila le piège… La colonisation, quoi…
Le lendemain après un réveil pas trop tard, Aude file faire son “expérience “ d’épilation paraguayenne et quelle réussite! A son retour, la pauvre est brûlée sur les 2 jambes avec de la cire encore collée. Elle essaiera bien de prendre une douche, sauf que comme par hasard, il n’y a pas d’eau froide et autant dire que ça la brule. Du coup, peu motivés par le charme de la ville et en l‘absence de possibilité de louer un 2 roues pour explorer les environs, nous décidons de partir de l’hôtel et de la ville. De toute façon, nous étions venus ici pour venir voir les “réserves indigènes”, mais comme nous ne sommes pas fan de zoo et que les choses semblent compliquées, on migre prendre des tickets de bus pour la Bolivie. Seulement, le bus est cher, tard le soir, il fait chaud, les jambes de la demoiselle brûlent un peu, donc on décide de patienter un peu à l’ombre en prenant soin de mettre de la glace sur les mollets de Aude. Nous voyant tout miséreux, un Mr se proposera de nous offrir l’hospitalité de son bureau climatisé, afin de pouvoir échanger sur nos impressions de voyage et d’en connaitre un peu plus sur la culture paraguayenne. Le Monsieur sera très gentil et nous questionnera à la manière d’un examinateur, mais très courtois, nous parlera un peu de cette misère qui est ancrée dans son pays et dont il considère que ce sont les Paraguayens les premiers responsables. Si ce n’est que la participation des Etats-Unis (tiens encore eux), mais également des pays Européens, c’est-à-dire une exploitation des réserves minérales, minières et ressources en eau du pays, par le bais de multinationales, n‘est pas forcement là pour le bien général... C’est étrange de voir comment un mot ou concept (“multinationales“) reste assez vague et inoffensif dans notre vocabulaire, alors qu’il renvoie à une réalité de terrain absolument abominable, auprès des populations locales. Détruisant la société, le mode de vie, les ressources, déplaçant les populations en les exploitant de surcroît. Ici les “indigènes” ont eu leur terre rachetée (ou pas d’ailleurs!) et travaillent ensuite comme ouvriers pour ces entreprises à des salaires bas et des conditions dures (emmenés en camion benne avec des horaires approchant les 35 heures mais par jour!), sans avoir un réel choix. Car pour avoir le choix, il aurait fallu avoir plusieurs types de solutions avec une liberté dans la réponse à donner.
Toujours est-il qu’après un accueil très sympathique de ce monsieur, un peu de crème sur les jambe et un bon repas au pain et au fromage (genre tu mélanges du lait et du sel et tu fais sécher), nous voila partis sur la route, direction la Bolivie…
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