dimanche 21 juin 2009

Impressions à 10 mois de voyage, impressions à la fin...


Question longtemps posée : alors ? Ca fait quoi de rentrer ?
Rentrer… Mais on n’est pas encore rentrés ! Pour l’heure, le retour signifie revoir nos proches, retrouver cette chaleur si appréciable de la Relation.
Et puis rentrer, c’est faire ce que l’on a tellement l’habitude de faire, nous qui vivons à La Réunion, c’est revenir là d’où on vient et expérimenter encore cette impression de « jamais partis ». En France, tout est comme avant : je connais les panneaux, je connais les rues, je connais le visage des gens, je connais (sais ?... !) les prix, les coutumes, et surtout, je retrouve tout de suite mes amis comme je les ai quittés. D’ailleurs, c’était hier, non ?

10 mois de voyage, c’était génial, une expérience de vie de dingue, des paysages et des gens plein la tête, de sacrées leçons de vie. Et puis 10 mois de voyage ça contient sa fin. On le savait, le billet retour était là. Alors 10 mois de voyage c’est aussi une préparation insidieuse à la fin du voyage qui s’est faite naturellement depuis quelques semaines. Donc… 10 mois de voyage, c’était génial et naturellement c’était fini.

Je pense à tous les « tourdumondistes » qui sont rentrés, mais vraiment rentrés : retour chez soi, retour au travail. Pour nous c’est plus facile : nous rentrons sans rentrer, nous rentrons pour être en vacances avec nos proches dans un autre environnement que le nôtre au quotidien alors la fin du voyage… pas tout à fait ! Quel luxe ! Dans quelque temps il faudra retrouver le travail et là… On en reparlera !

10 mois, c’est long et c’est court. Aujourd’hui, 10 mois, c’est un mouchoir de poche qui englobe ma perception du monde. Oui c’est ça : englobé dans un mouchoir de poche, on prend mieux la mesure de notre petitesse.

Vive le monde et à bientôt pour un nouveau voyage. Car de toute façon, on repart bientôt, hein mon chéri ?!
Aude
Déjà? Enfin! Mais ça a été rapide! J’en veux encore, vivre et voir des trucs, des gens, des paysages, des cultures et profiter de tout! Mais non, ça se termine, un peu trop tôt, un peu trop vite, un peu contraint, un peu rapide, mais avec le plaisir de se poser… C’est bien aussi d’être rentré.
Effectivement, on a fini le voyage sans la cerise sur le gâteau, une tentative qui n’a pas fonctionnée, celle de pouvoir avoir un enfant, fruit de la richesse et du plaisir du voyage. Je ne ressens pas trop de tristesse, mais plus par rapport à la situation et ma chérie. La vie n’est pas tout le temps comme on le souhaite, mais elle ne fait que remettre à plus tard ce projet. Finalement c’est sans échéance que l’on va pouvoir revenir à la Réunion, sans être débordé, le temps de se remettre à la recherche d’un nouveau quotidien, retrouver une maison, un travail, une voiture, passer enfin ce putain de permis moto, refaire du Morey, retrouver les potes et faire la cuisine (vivement un petit rougail saucisses!!)
Je suis heureux de ce voyage, de ce temps pris pour moi, pour nous, de vivre d’autres choses dans un contexte parfois et même souvent hors de ce qui nous entoure dans la vie du monde occidental (et non moderne). En dehors d’une technologie débordante, d’une consommation à outrance, d’un gavage omniprésent et abrutissant. Et c’est bien ça qui se passe : on court à 100 à l’heure pour gagner de l’argent et essayer de prendre du temps, alors qu’il suffit de pas courir et le prendre. Pas facile en période de crise!
Alors quel est le pays préféré ? Ou tu aimerais retourner? Voilà les questions qui vont arriver, mais je n’ai que peu de préférences, tellement tout a eu une issue positive, même dans nos petites galères (aucune vraie tuile… ), nos engueulades, les coups de malchance. Que du bonheur de paysage, avec la météo, avec les rencontres, avec nous -même. Je n’ai pas eu de révélation, seulement des confirmations sur certains de mes doutes et une précision de ce que j’aime, je veux et je fais.
Juste déçu par une nature humaine faible, qui se laisse dériver, parce que personne ne voit plus loin que le bout de son nez, avec ce besoin de dominer et d’avoir toujours plus que son voisin.
Juste une page qui se tourne, un livre qui se ferme, ce rêve a été exaucé, c’est le deuxième pour ma part et il y en aura d’autres… Vous faites quoi demain?

PS: Un grand merci à tout ceux qui ont eu le courage de nous suivre, de nous lire, de nous voir, de nous répondre.
Un grand merci aux visages rencontres pour une minute, une heure, une discussion, une marche, un transport, un foot, une bière!!
Un grand merci à ma famille qui nous a rejoints dans le voyage.
Un grand merci à ma chérie.
Et un super merci pour Kiki.
Matt

mercredi 17 juin 2009

Bilan de Cuba

Cuba...

- En rencontre : ben oui, toujours les rencontres en premier, et autant dire qu’à Cuba, y’a des choses à dire… Après 2 semaines passées ici, nous en arrivons à la conclusion suivante : les Cubains pensent que tous les touristes ont de l’argent (“mais vous pouvez bien vous payer une chambre à 40$!” dédaigne l’infirmière en direction de Matthieu…) et surtout, surtout, les Cubains laissent régir toutes leurs relations aux touristes par l’argent. Du coup, ils sont menteurs, arnaqueurs, En gros, touriste = vache à lait = sourire et gentillesse pour extirper le plus de maille possible du pigeon = mais quelle horreur. Le hic? C’est que énormément de Cubains se comportent comme ça, et pas seulement ceux en contact direct avec les touristes (casas particulares, restaus, transport), comme nous avons pu le voir à tant de reprises… Pourtant, nous pensions vraiment que la salsa allait nous ouvrir des portes, mais à part les portes des chambres, chiottes, voitures et autres portes cochères où j’ai été invitée… Rien.
Heureusement, nous avons eu aussi de bonnes surprises, comme David et Lidia de La Havana, la famille à l’ananas près de Vinales, Amerys et Félix, mes parents de Playa Larga, et surtout, la famille de Dulce, adorables Cubains rencontrés sur un coup de cœur… pour une paire de chaussures! qui auront été jusqu’à venir me visiter à la clinique : simples, brillants, un vrai plaisir. Et nous parions que les Cubains, dans l’intimité ou entre eux, sont, à l’image de la courtoisie dont ils savent faire preuve, solidaires et attentionnés. Dommage que nous ne les ayons pas rencontrés davantage dans ces conditions…

- Sur la route : et justement, c’est sur la route que l’on observe le premier civisme de ce peuple : les clignotants!!! Le droit de passage du piéton!!! Le respect du code de la route!!! Incroyable! On avait presque oublié que ça existait! Quant aux transports locaux, pas un Cubain ne restera assis en présence d’une femme ou d’une personne âgée. Merci pour eux. Mais la route à Cuba ne serait pas ce qu’elle est sans la présence des bagnoles dont nous avons déjà parlé, transformant le bitume en pellicule de film poussiéreux. Cuba, ses américaines et son style suranné, prend toute sa saveur là, dans l’allure tranquille d’une Lada lancée à pleine vitesse (60km/h)…
Par contre, Cuba connait, à notre goût, un gros problème de transport tant les bus, trop irréguliers et rares pour accueillir la foule qui s’amasse sur les bas-côtés des routes, débordent de passagers, laissant toujours la moitié des Cubains en partance sur le carreau. Heureusement, ce n’est pas la lecture qui manque, et si l’embargo a préservé Cuba d’une des facettes de la société de consommation - la pub -, ce sont ici les panneaux de propagande qui ont loi, Révolution oblige…

- En paysages : des immeubles aux façades décrépies du vieux Havane à la campagne verdoyante et généreusement tropicale de la campagne en passant par les eaux turquoises de la côte, Cuba a tout à offrir au voyageur en quête d’exotisme. Et si notre déception de ne pas pouvoir quitter l’étiquette de “touriste” nous a un peu gâché le paysage, il faut bien reconnaitre que l’île est belle pour celui qui vient pour la regarder… Dommage pour nous!

- En nourriture : On nous avait dit, comme pour quasiment tous les pays de notre voyage, que la nourriture à Cuba n’était pas bonne et était affreusement peu diversifiée. Or, si le plat de base riz “congris” (préparé avec des grains noirs) - poulet ou porc est le seul plat en vente dans les petites échoppes de l’habitant, au menu des paladares (restaurant chez l’habitant) ou des restaurants, tout un choix de viandes, poissons et crustacés s’offrait à nous. Et j’aime autant vous dire que, oui, les Français avec notre Cuisine (tellement sacrée qu’on lui mettrait bien la majuscule), on a pris l’habitude d’être un peu difficiles à convaincre, nous pouvons apprécier à sa juste valeur la langouste à la sauce au vin blanc et à la tomate! 4 fois mon pote! Mum!

- En musique : et ben parlons-en, de la musique. Il parait qu’à Cuba, ce serait un affront de dire qu’on joue de la salsa, cette musique appartenant à la communauté cubaine et portoricaine de New-York, alors que la musique de Cuba est et doit rester de la “musique cubaine”. Alors nous avons entendu du son, oui, mais aussi des groupes célèbres aux oreilles des salseros comme Los Van Van ou encore Azucar Negra, bref, desoleee les Cubains, de la bonne salsa qui fait vibrer les pieds dans les chaussures! Malgré tout, nous avons été déçus du mauvais son qui rendait difficile l’appréciation des instruments dans la très célèbre “Casa de la musica” de La Havane (entrée 18 euros quand même…) et par l’ambiance “tiens, j’écoute un CD” de la salle qui n’applaudissait même pas à la fin des morceaux… Surtout, nous avons entendu au moins autant de reggaton, la boite à images pro-états-uniennes des Caraïbes, que la jeune génération comme les autres semblent maintenant préférer à sa concurrente latino. Déception du public!

- En danse : et la danse alors? Même tarif, même punition. Nous avons pu danser extrêmement peu de fois, tant la salsa était souvent alternée avec du reggaton et que l’ambiance nous a plus souvent incitée à rentrer chez nous qu’à participer au mouvement général. Oui parce que je n’ai pas mentionnée ici la cuban attitude. Ici, si la moitié de la population féminine était prostituée il y a 50 ans et que cette tendance est difficile à chasser encore aujourd’hui (énormément de jinteras, “hôtesses” de soirée officieuses), si les Cubains se targuent de leur liberté pourtant plus que conditionnelle quand on sait que rien ni personne ne rentre ou ne sort du pays, si l’on prend la mesure du capitalisme débridé dont font preuve les Cubains à l’égard du touriste alors que partout est vantée la gloire du communisme, bref si l’on considère certaines des Contradictions cubaines, on se demande bien sur quoi repose toute cette “fierté” cubaine, si proche du dédain ou du snobisme... Par contre, on ne se demandera pas sur quoi repose le machisme légendaire des Cubains, ni pourquoi le sport national semble être pour les hommes de “pêcher de la Blanche”. Jamais je n’ai eu tant la sensation que la danse était
- une excuse à drague lourde pour les hommes
- l’occasion de remuer, mais quand je dis remuer… pour les femmes

- En physique : Bon là par contre, j’avoue que, autant le concours de grosses miches et short-ceinture a filé de sacrées douleurs cervicales à Matthieu (et vous croyez vraiment que je vais le plaindre?!), autant de mon coté, c’est le regard transi que j’ai admiré… la force gracieuse des corps des danseurs? Car il est vrai que beaucoup de Cubains avaient les moyens de leur arrogance et qu’un sourire éclatant, un regard vert sur une peau mate ou encore la musculature saillante des Noirs, on avoue, on craque. Groar!

- En argent : ben c’est bien ça le problème, l’argent... Depuis 2004, Fidel la crée le CUC, le peso convertible, comprenez la monnaie pour touristes pour remplacer les dollars US (même conversion). Et si les Cubains utilisent le plus souvent leurs pesos cubains (25 pesos cubains pour 1 CUC), les produits “chers” se paient toujours en CUC. Rajoutez à cela la course aux devises des communo-capitalistes et ça y’est, tout rapport est modifié. Rien n’est gratuit, tout se monnaie, et au prix fort de préférence. Cuba devient une destination chère pour le touriste : 30,5 euros par personne et par jour, entre 15 et 25 CUC pour une chambre double, 3 CUC le petit dej par personne!, 12 CUC les 2h30 de bus et entre 4 et 8 CUC pour un plat au restau. Surtout, les touristes paient des prix de touristes : pas d’accès aux bus locaux, et comme pour les Cubains touriste = riche, chaque service est proposé à un prix aberrant. Le même plat, vendu au restau 4-5 CUC, est proposé dans la rue à 20-25 pesos cubains, soit 4 à 5 fois moins cher… Un trajet de 3h payé 7 pesos cubains avec le transport local est proposé à 100 CUC par une voiture particulière!!! 300 fois la mise!!!! Et après, on va nous dire que l’essence est chère, que les Cubains sont pauvres etc. Oui ils sont pauvres, mais jamais on n’aura tant entendu un peuple se plaindre de tout notre voyage, alors que eux disposent de la santé, de l’éducation, d’un logement s’ils n’en ont pas un et d’un minimum de nourriture. Alors nous sommes un peu durs sur la question, mais c’est que cette question financière est celle qui a rendu tellement difficile notre rapport avec les gens, modifiant la mentalité des Cubains et transformant le touriste en portefeuille ambulant… Quel dommage…

- En politique : la question qui nous intéressait beaucoup, forcement, avant et pendant notre séjour à Cuba, c’était de savoir comment les Cubains vivaient leur régime politique. Nous qui avons appris très tôt que les Méchants c’étaient les Vilains Cocos et que les Gentils c’étaient nous (ben oui, forcement), nous les pays riches qui veulent plus d’argent quitte à asservir les “petits pays”, nous avons reçu par l’école l’image d’un communisme dictatorial, prétextant une idéologie humaine au service des viles intérêts de ses despotes mégalomanes… Pourtant, visitant le pays, découvrant le système de santé, l’alphabétisation et d’éducation, découvrant que le carnet n’était pas un livret de rationnement mais plutôt un livret de délivrance des produits de base pour les familles pauvres ; pourtant, lisant l’histoire, découvrant que Castro était aussi Fidel à ses idées qu’à son peuple, préférant toujours les intérêts de la population aux avantages particuliers et se donnant sans cesse les moyens de réaliser et son ambition et ses principes moraux et idéologiques ; pourtant, discutant avec les gens, nous avons toujours entendu, sans langue de bois, les généreux remerciements d’une population. Certes, notre échantillon était pauvre et nous sommes conscients que d’autres échos doivent demander plus de liberté. Mais, pour notre part, nous avons trouvé que la politique de Castro, droite, claire et directe, a considérablement relevé le pays (autrefois bordel, hier glorieux, aujourd’hui en difficultés mais sans misère) tout en respectant la volonté révolutionnaire toujours active : restituer une politique à destination du peuple et non d’une poignée de nantis.

- En tout : Cuba, c’est la fin du voyage et c’est la désillusion. Il y avait l’image de Cuba : l’exotisme, les vieilles bagnoles, la salsa, la plage, l’ambiance Buena Vista et les cocktails. Et puis il y a eu notre séjour : rencontres difficiles, déception concernant la mentalité cubaine, pas le temps d’aller à la plage, peu de salsa, pas d’alcool pour moi, et surtout, cette fin de rêve de bébé… La conception mais aussi tout ce que nous avons aimé avait participé à dire : “la Bolivie, le pays qui vous réussit”. Très vite une autre expression est née, maintes fois confirmée : “Cuba, le pays qui vous réussit pas”. Et puis la quête de l’argent et cette impression de passer pour un blaireau souvent, ça nous a presque fait dire “Cuba, n’y allez pas”. Avis aux commentaires…

mardi 16 juin 2009

Fin d'un voyage, fin d'un reve...

Ah c’est donc ça, le syndrome de la page blanche. Ce truc où on ne sait pas par où commencer…
Notre blog a toujours été une page ouverte sur notre voyage comme sur notre monde. C’est donc naturellement et d’un commun accord que je vais tenter le difficile récit de la fin de notre voyage.
Nous avions une envie, que nous avons transformée en projet : notre tour du monde. Nombreux sont ceux qui nous ont dit que nous avions de la chance. Nombreux sont ceux qui pensent que tout nous réussit. Et nombreuses sont les fois où j’ai souffert de cette croyance, laissée seule car après tout, elle se débrouillera bien, tout lui réussit. Mais ça, c’est une autre histoire. La chance que nous avons eue, nous nous la sommes créée. Et si, oui, nous avons profité d’une certaine chance, c’est parce qu’avant tout, on s’est donné les moyens de la réaliser.
Nous avions également un rêve, que nous avons voulu transformer en réalité, celui de ramener de notre voyage, au-delà des magnifiques souvenirs que nous voulons offrir à notre entourage ou parmi lesquels nous voulons vivre, le projet de toute une vie, un nouveau voyage… un bébé.
En Argentine j’arrêtais la pilule, au Brésil je pleurais de n’être pas enceinte, de peur du spectre de la stérilité. Et en Bolivie, après notre périple en jeep dans la magnifique région d’Uyuni, nous apprenions que le fruit de notre amour et de notre désir était en train de se constituer en moi. Quel délice, quel bonheur dans lequel on s’est immergés, transportés par ce qui devenait notre secret…
Pourtant à Tunupa, notre ascension à 5400m, j’avais eu un saignement. Alors à La Paz, on consulte le gynécologue qui prescrit une semaine de repos, pendant que Matthieu va faire son Rahan dans la montagne.
Les semaines passent et avec elles s’enclenche le décompte, non plus du nombre de mois de voyage écoulé ou du nombre de semaines nous restant à voyager, mais du nombre de semaines de grossesse. Le spectre d’une fausse couche pourtant, agitant une épée de Damoclès à mesure que des traces de sang ponctuent l’avancée dans le calendrier, assombrit la perspective et nous demande de garder toute notre mesure. On ne sait jamais.
Et puis à Vinales, on part faire une balade à vélo que je juge trop longue, bien qu’elle ait été déconseillée par Matthieu au départ. Mais une femme enceinte n’est pas une femme en sucre, non?
Et puis quelques jours plus tard, après la plongée, les traces deviennent sang. On attend, moi les pieds en hauteur sur les barreaux du lit, Matthieu à mon chevet tentant d’exploser le score au solitaire.
On attend et l’attente devient moisissure à mesure que les petits saignements augmentent. Accompagnés par Amelys, ma maman Cubaine, nous partons donc à l’hôpital du coin pour la consultation gynécologique la plus improbable de tout le voyage, à l’heure où j’en ai le plus besoin, et dans LE pays de la santé de tout le continent Américain. Allongée sur une planche de métal dont les claquements gondolés entravent ma communication avec le bourreau qui me sert d’infirmière, avec pour couverture d’hygiène un morceau de carton attrapé négligemment sur l’étagère décrépie d’à coté, la dame en blouse blanche m’enfonce sans chichi l’instrument gynécologique préféré des femmes, sorti, avec les gants (mais c’est pas pour l‘hygiène du matériel, les gants…), de son emballage en carton avant que ces mêmes gants poursuivent l’examen sans plus de précautions. Le verdict est sec et adressé à Amelys : du repos, et une femme enceinte ne voyage pas. Visiblement, y’en a une qui a raté sa vocation de bouchère…
Le diagnostic, dicté par un si sommaire et incompétent examen, ne me rassure pas, et c’est avec résignation que je retrouve ma chambre dont la seule différence avec une cellule est la douce attention de Amelys et de sa mère. Il faut dire que depuis que je suis enceinte, j’ai toujours bénéficié de la bienveillance naturelle et de l’entrain de toute l’Amérique du Sud, à commencer par le cadeau de suerte (bonne chance) de Tania et Stéphane (un magnifique ensemble pour bébé), jusqu’aux tendres félicitations de tout le peuple Latino. C’est aussi grâce à ma grossesse que nous avons eu les meilleurs contacts avec les Cubains, de l’ananas offert à la femme enceinte à Vinales, jusqu’au test pour le sexe du bébé auquel je me suis prêté 2 fois, prétextant toujours n’en avoir jamais entendu parler avant pour jouir encore une fois de ce moment de connivence unique entre les femmes du Monde et moi.
Mais dans notre chambre de Playa Larga, ce n’est pas la connivence qui est au rendez-vous mais l’empathie dans la tristesse et la peur.
Encore du sang, plus de sang. On ne peut pas rester comme ça. Et si le trajet jusqu’à La Havane déclenchait la fausse couche? Qu’il est difficile de savoir que faire dans ces moments.
Nous partons pour La Havane le lendemain matin, refusant “l’offre” de Félix de nous y faire conduire en taxi (pour 50-55 CUC contre 27 CUC réellement payés avec le bus. Félix serait-il comme tous les Cubains à vouloir faire de l’argent jusque dans ces moments-là??).
Demander une voiture particulière jusqu’à l’autoroute.

Attendre sur l’autoroute le passage du bus.

Prendre le bus. Retenir ses larmes pendant le trajet et ses secousses.
A La Havane, on attend le contact médecin de Félix qui ne vient pas. Je me sens faible, j’ai des sensations de règles dans le bas du ventre : stop. On file en taxi à la clinique des touristes.
Un examen gynécologique ; l’utérus est trop petit pour contenir 9 semaines de grossesse. Un test de grossesse positif ouvre les portes de l’écho mais…
Mais l’œuf est trop petit et irrégulier. Avortement spontané. Le monde se coupe en deux et s’effondre.
Une fausse couche pendant le voyage, subir un curetage loin des miens, avoir peur de ne plus pouvoir avoir d’enfant après, voila ce que je redoutais le plus, le numéro 1 de mes angoisses.
Les idées se débattent ; nous partons tant bien que mal de la clinique qui refusait de nous laisser partir et nous demandait de payer une somme impossible (120 euros l’échographie à titre informatif) : sommes-nous les meilleurs clients de la semaine? Les Cubains ne peuvent-ils pas s’empêcher à une occasion aussi grave de chercher le profit? Nous sommes perdus et préférons prendre l’avis de l’assurance pour savoir si un rapatriement est possible.
- C’est une urgence Mademoiselle, vous ne pouvez pas risquer de faire une hémorragie dans l’avion.
Opérée à Cuba. Je suis fatiguée, vidée. Et bien allons-y maintenant s’il faut le faire.
Souvenirs de mes larmes incontrôlables et de mes tremblements d’émotion quand les infirmier et anesthésiste me sanglent et me préparent à l’opération.
- Ne vous inquiétez pas, tout va bien se passer.
Mais j’ai perdu nos envies, notre bébé-tour du monde, notre joie et notre malice à imaginer comment nous allions annoncer ma grossesse à notre retour. Quand on trinquera à notre retour, on pourrait dire… Les images tant fantasmées défilent dans la tête, mais le rêve est mort en moi il y a déjà 3 semaines. Endormez-moi, je veux fermer ma conscience sur ces images trop joyeuses auxquelles la Faucheuse ôte tout espoir de réalité.
J’ouvre les yeux sur un corps endolori et fatigué. La pensée me revient et avec elle les larmes. C’est fait. Je ne suis plus enceinte. Nous n’aurons pas de bébé tour du monde pour commencer un nouveau voyage.
Dans 2h un taxi vient nous chercher pour le rapatriement, heureusement possible et orchestré magistralement par Matthieu et l’assurance en France. Finalement, être une série de numéros, ça a du bon des fois.
Dans 5h notre avion décolle. C’est 7 jours avant la date prévue de notre retour. C’est aussi une éternité après la fin de notre voyage.
Le tour du monde, c’est fini.
Un autre voyage commencera plus tard, adieu à l’embryon qui nous a accompagnés ces dernières semaines. Merci mon amour d’autoriser mon chagrin à s’exprimer sans parier sur ma prétendue force et d’être aussi attentif et attentionné.
Aude

dimanche 14 juin 2009

Playa Larga, baie des Cochons

Nous voici donc ENFIN arrivés sur le lieu de nos vacances. Nous projetons en effet de rester là quelques jours pour respirer, profiter de la plage et de la mer Caraïbes, nous relaxer et faire la transition du rythme de voyage à notre retour proche.
A peine débarqués du bus (qui quand même nous dira qu’on aurait pu lui dire “avant” qu’on descendait ici?>!%..> Mais José, tu as mis la destination sur nos bagages en soute, tu l’as lue sur nos tickets et tu nous l’as demandée quand on est montés!!), nous sommes accueillis par un homme, visiblement seulement de passage, qui nous renseigne aimablement sur notre orientation. Tiens, un Cubain désintéressé, nous disons-nous, bien que méfiants compte-tenu de notre expérience cubaine… On suit quand même ses directives pour arriver au “centre-ville”, une vague place sur laquelle broute un cheval. On se fie finalement au guide du routard pour atterrir chez Amerys et Félix, deux adorables Cubains à qui on explique de suite qu’on veut être prévenus de ce qui sera payant ou non, racontant nos déboires et pariant sur cette explication pour vivre sereinement notre séjour chez eux. Amerys, femme forte de caractère et la tête bien sur les épaules, hallucine littéralement de ce qu’on lui raconte et nous assure que chez elle, les fruits sont gratuits et que nous sommes ses HOTES. Effectivement, prenant nos quartiers dans la chambre, nous avons par la même occasion pris nos quartiers dans la maison ; la chambre, ouverte sur le salon et face à celle des logeurs, donne au voyageur sa qualité d’habitant de la maison plus que de touriste.
Nous partons faire une petite balade dans le village, juste assez pour recroiser le monsieur de tout à l’heure et vérifier la thèse de la gentillesse gratuite (quel plaisir…), ainsi que de tester l’avidité des moustiques! Nous apprenons à nos dépends que nous sommes dans une zone marécageuse… Un peu d’ombre et hop! Une attaque armée en règle! Ceci n’est pas sans rappeler l’attaque armée de la baie des cochons où nous nous trouvons… De toute façon, celui qui l’aurait oubliée aurait vite été remis au parfum vu le nombre de panneaux de propagande qu’on trouve ici… On n’a pas pu les prendre en photo de peur de nous faire confisquer l’appareil (Fidel, apparemment, n’aime pas trop l’exportation de sa propagande…), mais les panneaux mentionnaient tantôt la gloire de la Révolution dans sa face armée (“ici la Revolution a triomphé de l’impérialisme Yanki” etc),

tantôt dans sa face quotidienne (“La Revolution a doté les écoles d’ordinateurs” ou encore “la Revolution lutte contre les injustices dans le monde”). Surtout, le fameux slogan “La Revolution c’est le désintérêt, l’héroïsme, le socialisme, l’altruisme et la solidarité“. A bon entendeur… Cela dit, les Révolutionnaires Cubains ont quand même réussi à débouter pas moins de 1200 hommes armés jusqu’aux dents par les USA (tellement pas discrets que les journalistes Français annonçaient le débarquement 4 jours avant! C’te honte, les Etats-uniens!) avec les moyens du bord, la force humaine déployée par l’idéalisme Castro… et un seul téléphone en état de fonctionnement! Et déjà que faire capturer 1100 prisonniers cubains dépêchés par les USA sur 1200 c’était fort, mais quand c’est en plus pour les échanger ensuite contre 54 millions de dollars de médicaments et de nourriture à destination de la population, là, je dis que Fidel, c’est le genre de mec qui fait c’qui dit, qui dit c’qui fait, qui fait c’qui dit et que, même si ses discours duraient des heures, à la différence de Sarko, c’qui dit, c’est pour le bien-être du peuple (référence au sketch mémorable d’Anne Roumanof chez Drucker que je vous incite à télécharger …) et ça, c’est chapeau.
Bref! Nous rentrons finalement, boursoufflés de piqures de moustiques et assoiffés par cette chaleur (mais quel délice!), nous refugier sur la véranda d’Amerys et ses nonchalantes chaises à bascule… Un p’tit cocktail? Aller! Comme ça, c’est bon d’être Cubain! Un repas de langouste parachèvera la douceur de cette première journée… Tranquille!
Dès le lendemain, Matthieu se laisse séduire par les appâts des Caraïbes et nous partons avec Félix, notre hôte mais aussi un loup de mer, instructeur de plongée et Co-plongeur avec Cousteau lors de son unique visite à Cuba… Mais je laisse mon amoureux vous raconter ça…
Nous voilà levés tôt pour aller profiter de la journée et d’une petite plongée. Nous partons comme prévu avec un chauffeur qui nous coûtera tout de même près de 20 CUC (environs 20 dollars), c’est quasiment le prix de la plongée! Au départ nous avons droit à une superbe automobile, une bonne vieille Fiat des années 50 de toute beauté. C’est un vrai plaisir de faire cette demi-heure de route au milieu des pins et des marécages pour rejoindre le site de plongée Punta Perdiz. Une fois arrivés, on s’équipe avec Felix et je me jette à l’eau. Nous sommes au milieu d’une baie, qui est en fait un lagon d’une couleur bleu émeraude de rêve.

Et c’est parti, direction la barrière de corail. En effet, le départ se fait de la côte et les premiers coup de palmes se font dans le lagon qui abrite déjà des rochers couverts d’éponges, de corail, de plantes et autres végétaux aux couleurs tropicales, comme dans un aquarium. Puis tranquillement, on descend un peu plus profond autour de 14-15 mètres pour découvrir ce si rare corail noir, qui peut prendre parfois l’aspect d’une grosse feuille quadrillée, qui se balance dans l’eau : superbe. On commence alors à descendre davantage et les grosses éponges en forme de cheminée prennent des couleurs jaune, violette, verte. Nous arrivons près d’un tombant où la flore et le plancton ont littéralement pris possession du lieu. Ce sera l’occasion d’y croiser quelques jolis poissons qui rappellent ceux vus en mer Rouge ou à la Réunion… Comme promis et voyant que ça roule pour moi, on passe à travers des cavernes, habitations de quelques langoustes et autres crustacés. Au second tunnel, la sortie se fait sur une épave de bateau, vestige vraisemblablement militaire, puisque nous sommes très proches de la playa Giron, où a eu lieu, il y a quelques décennies, le débarquement manqué des anticastristes, entrainés et aidés par les USA. L’occasion pour moi de visiter ma première épave de mer. Puis, nous continuons par un autre tunnel aquatique qui débouche sur un autre tombant, celui là encore plus profond puisque la visibilité est de 20-25 mètres, que je ne vois pas le bout et que je suis moi-même à …35 mètres! Ca le fait bien, pas de problème de compression, bonne lumière et j’ai la chance de pouvoir voir un barracuda! On revient tranquillement sur la fin de plongée par la lagune, couverte d’espèces végétales colorées. A la sortie, malgré un souci sur les derniers mètres avec mon masque, je suis ravi. Du coup, Félix me propose d’en refaire une d’ici une heure, histoire de se reposer, déguster une bonne pastèque, laisser passer les 15 personnes qui viennent d’arriver et zou!! On part dans le lagon une seconde fois. Plongée totalement différente, je vais en prendre plein les mirettes de couleurs aussi bien végétales que animales. Les poissons sont à profusion, en bancs entiers et sont de toutes les couleurs, toutes les tailles, jouant à cache-cache dans la roche, les algues, les éponges, les coraux et les plantes. Plus de 50 minutes, où les poissons plats, les poissons licornes, les balistes, les méduses vont être, comme Félix m’avait prévenu, autant d’œuvres d’art vivantes entourées de coquillages.
Au total : 2 plongées de qualité à un prix défiant toutes concurrence, car à moins de 50 euros dans une mer très claire offrant variétés d’espèces vivantes. Le littoral ici est un des mieux conservé au monde, ne subissant ni la pêche, ni le trafic des bateaux et peu de passage par les plongeurs. Pour le reste, mes mollets en gardent un souvenirs assez bronzés!
De mon coté, j’ai aussi pu profiter des superbes conditions de visibilité car Félix avait gentiment mis à ma disposition la totale palmes-masque-tuba et c’est surveillée par son fils de 8 ans (!) que je me laisse séduire par la faune et la flore du lagon. Je sais que les requins des Caraïbes peuvent se rencontrer jusqu’à 0 mètre de profondeur alors seule, je ne fais pas ma maligne et ne me risque pas dans l’obscurité du tombant : courageuse mais pas téméraire conclus-je pour me rassurer de ne pas être qu’une poule… mouillée! Puis je suis restée sous la cabane à l’ombre et les yeux bercés par la couleur turquoise de la mer. D’autres femmes sont là à surveiller leurs enfants pendant que leur mari sondent les profondeurs. Et comme si souvent, c’est dans ces moments imprévus et surtout informels que, loin des contraintes économiques de la possibilité de vendre quelque chose au touriste, le contact s’établit le plus naturellement et le plus facilement. Nous voila à discuter chiffons, puis voyage et voyageurs, l’occasion encore une fois d’entendre les plaintes formulées à l’égard des Israéliens, décrits, encore une fois, comme des gens désagréables, exigeants, éternellement insatisfaits et j’en passe… n’y’a-t-il donc aucun pays à part les Etats-Unis qui puisse piffrer ce peuple?! Mais je sens que toute la communauté juive va me sauter à la gorge et crier à l’antisémitisme alors j’arrête de les gazer (oh ça va! Un peu d’humour n’a jamais fait de mal!).
Matthieu remonte tout doucement, les yeux éblouis par la beauté des fonds qu’il vient d’explorer, et nous rentrons à la case.
Il est 15h, nous avons mangé une petite pizza, avons dansé amoureusement sur la varangue ombragée de la maison, quand un saignement se déclenche…

vendredi 12 juin 2009

Un transport a Cuba...

Vinales, jeudi, 9h du matin, début du trajet
Nous partons de Vinales pour rejoindre Playa Larga, située sans doute à environ 250 km de là. Gorgés de la confiance issue de notre expérience de trajet populaire précédente, nous partons vers la route, laissant Manzana et ses conseils de prendre le bus direct Vinales-Trinidad. Mais nous faisons fi de ses précautions et de la somme extravagante qu’il faudrait payer et tendons fièrement le pouce, que dis-je, relevons la tête, bombons le torse et levons l’index négligemment à chaque passage de voiture. Ben oui, c’est qu’on a bien compris qu’il fallait se fondre dans la masse pour espérer être pris en stop sans qu’on nous demande des prix de tarés… En effet, à La Havane, on nous avait tout de même “proposé” de nous faire faire 5 km en voiture particulière pour 20$!!! Alors objectif paraitre Cubain, sous entendu planquer les sacs et faire le coq pour Matthieu, la snob pour moi!
Comme prévu, une voiture, deux voitures, 10 voitures passent en l’espace des 30 premières minutes, sans jamais s’arrêter. Mais c’est pas grave, on a le temps et préférons en perdre mais gagner cette expérience de trajet populaire plutôt que de céder à la pression financière imposée au touriste… Et d’ailleurs il suffisait de le dire pour qu’un camion s’arrête un peu en amont sur la route et prenne tout le monde… sauf nous. Ah. Nous, on a juste le droit d’écoper d’un signe “non” du doigt, le regard sérieux à sévère. Sympa. Mais ils ne savent pas qui on est! Ha! Et même si l’expérience se renouvelle 3 fois d’affilée, multipliant les expériences de flamby, on tient bon, à croire qu’on veut vraiment faire le bernicle avec le bitume… On commence vraiment à avoir les boules et à pester contre ce peuple décidément pas très aidant à l’égard du touriste si cela n’engage pas une certaine somme d’argent…
C’est à ce moment qu’un Cubain nous interpelle en anglais, nous indiquant gentiment qu’il faut nous mettre un peu plus loin pour avoir plus de chance de trouver un camion ou une voiture pour nous conduire à Pinar del Rio, notre première étape dans ce trajet. C’est marrant, se dit-on, c’est toujours dans les moments où on peste sur les gens que quelqu’un vient nous montrer un autre visage… On suit donc le monsieur qui nous conduit face à une école. Là, un mec en habit couleur bronze, cheveux lissés, colorés en blond et lunettes de soleil Sarko genre j’adore le photographe dans La Croisière s’amuse vient nous voir et nous propose d’aller à Pinar del Rio pour 2 CUC (2$)! Mais José! On sait que c’est 1 peso cubain par personne (soit 25 fois moins cher!), alors on interroge : et pourquoi 2 CUC? “Parce que vous êtes des touristes“ a-t-il le culot de répondre! Tu craques ton slip!! Et voila La croisière s’amuse renvoyé dans ses filets. Là, le type soi-disant gentil gratuitement, qui s’avère donc être un putain de rabatteur, nous indique qu’il a parlé avec le gars et que c’est vrai que c’est pas le bon prix : aller, pour nous, ce sera 1 CUC pour 2... Ah parce qu’en fait, les prix pour touristes sont négociables? Elle est bien bonne celle-là… Sur ces entrefaites un taxi collectif s’arrête mais déjà La croisière s’amuse s’interpose et indique au chauffeur le prix à demander. Et là, il faut préciser que La croisière s’amuse n’est autre qu’un pion de l’école si l’on en juge le tissu identique de la tenue des écoliers qui rentrent chez eux! Trop c’est trop, on prend nos cliques et la claque qu’on lui aurait bien mise et on retourne là où on était faire du stop.
On vous avoue qu’à ce moment, on est un peu outrés et que c’est avec un moins bon œil qu’on regarde les camions s’arrêter, nous faire “non” de la main et laisser monter la moitié de la population de la ville dans leur benne… Alors tant pis, on va pas non plus passer la journée là, on paiera 1 CUC par personne avec une voiture particulière plutôt que de retourner donner raison à La croisière s‘amuse, afin de rejoindre Pinar del Rio pas trop tard non plus.
Arrivés là-bas, on mange un bout (c’est qu’avec tout ça, c’est-à-dire les 25km qui séparent Vinales de Pinar del Rio…, il est déjà midi)… Nous sommes abordés par une rabatteuse qui nous donne encore cette sensation d’agacement parce que franchement, c’est pas qu’ils soient super nombreux les rabatteurs, c’est qu’ils sont super collants, régulièrement en travers de notre chemin et menteurs à nous donner de fausses informations tout le temps et ça, c’est franchement énervant. Une fois le ventre rempli, on décide donc de tenter le bus local, voyant bien que de toute façon, on ne va pas s’en sortir en stop… Ah oui mais c’est que le bus Viazul (la compagnie pour touristes auquel les Cubains n’ont pas accès) ne propose des trajets que le matin, et que le bus Astro (compagnie pour les Cubains autorisée à un nombre limité de touristes : 2 par bus!) nous est interdit. Pourquoi? Parce que vous êtes des touristes. Franchement, les mesures contre les touristes routards ici sont pires que celles prises à l’égard de la grippe porcine en Amérique du Sud, c’est infernal… Ben tant pis qu’on se dit, on va se rabattre sur les voitures privées. Nous retournons donc dehors et commençons à questionner sur les prix pour aller à La Havane, parce qu’on a bien compris qu’aller directement à Playa Larga était une hérésie (et dire que je peste contre le centralisme Français qui fait durer 8h le trajet en train La Rochelle - Brest… Mais au moins est-il possible me dis-je aujourd’hui!). Combien José?? 60$ par personne?! Trop c’est trop, on commence à se moquer d’eux autant qu’eux. A défaut d’être efficace, au moins, ça nous défoulera. “Non, pas 60$, 120!” Ben oui qu’il nous fait de la tête le bougre! Non mais ça va pas ou quoi?!
Puisque c’est comme ça, on se dit qu’on va refaire comme à l’aller et qu’on va parier sur le stop sur l’autoroute. 10 minutes de marche plus tard on arrive donc à l’orée de l’autoroute, là où plusieurs Cubains attendent à l’ombre d’un flamboyant en fleurs. Que c’est beau. Nan j’déconne, quand t’as l’impression de te faire grave enfiler, y’a rien qui parait vraiment beau! Tiens! Prends-toi ça dans les dents Cuba! (ça se sent qu’on a les boules, là?)
Et on attend. On tend la main fièrement, la tête haute, le torse bombé tousala, et v’là ti pas qu’il suffit qu’on fasse ça pour que Mme Grosses Miches (GM pour les intimes) se mette à faire pareil. Ben ouais, c’est pas la première fois et ce n’est pas sans rappeler ce truc du touriste modèle qui, du moment que tu as élu un endroit désert pour t’asseoir, choisi automatiquement le même, à croire que soit il pense que puisque tu l’as choisi, c’est que c’est le meilleur (donc il s’y met aussi), soit que c’est toujours rassurant d’être près d’un compatriote, hein (donc il s’y met aussi)! Bref…
Et on attend.
Et on attend.
Bon, maintenant ça fait 1 h 1/2 qu’on est là, que la population qui attend s’est renouvelée au moins 3 fois entre les gens qui sont montés dans les cabines des camions (souvent des femmes d’ailleurs), les gens qui ont été pris par des véhicules pour nous interdits et les gens qui sont partis, alors que fait-on?! On se donne encore 1/2 heure et après on s’arrache… Ce qu’on fait donc 1/2 heure plus tard, juste après l’intervention de Roberto, imbibé de tout le rhum qu’il a ingurgité depuis tout le temps qu’il attend : “wheeeere do you come from? Ah!… Francesa… Je ne parrrle pas fffffrancais” A la fois Roberto, ça fait 2 fois que je te dis, en espagnol, que je parle espagnol, mais c’est pas grave, au moins quelqu’un aura fini par nous parler. Car ici, c’est un peu à croire que sans les machos men qui peuvent aller jusqu’à me réciter un poème ou me proposer, tout en souriant à Matthieu, si je ne veux pas un “novio cubano” (ben tiens! Un fiancé cubain!), ou les rabatteurs qui ne nous parlent que pour nous soutirer de l’argent à un moment ou un autre, personne ne daigne vouloir avoir l’embryon de l’idée de nous adresser la parole. Aurions-nous l’air de petits cochons malades??
Aller, les sacs sur le dos, on retourne vers la gare routière pour voir s’il n’y a pas quand même moyen de monter dans un bus ou de trouver une voiture particulière pour nous emmener à La Havane…



Là-bas, même topo : le bus Astro de 17h nous est interdit et les prix des taxis collectifs sont prohibitifs. On rencontre à cette occasion 3 voyageurs, 2 Péruviens et un Cubain qui sont dans la même situation que nous, refusant de payer 50 fois le prix d’un transport et préférant attendre que les prix soient plus raisonnables… On attend un peu assis au su de tous les conducteurs de voiture particulière ou de taxi, genre la technique improbable du pêcheur, mais il faut se rendre à l’évidence : tant pis, on va donc attendre le passage du bus Astro sur le bord de la route car si l’organisme touristique nous en refuse l’accès, l’avidité potentielle du chauffeur peut-être pas… Demi-tour à nouveau pour retourner sur la route, à la sortie de la gare, pour attendre le passage du bus. En chemin, un Cubain nous interpelle, nous proposant sa chambre pas-chère-climatisée-y’a-un-bus-demain-sert-toi-dans-l’frigo-j’ai-un-ami-qui-peut-t’aider… Oui.. On te connait Mr José les Musclés… On trace la route, on nous l’a déjà fait trop de fois aujourd’hui et là, on n’est plus d’humeur. Mais à 17h, le bus surblindé ne s’arrête pas, et pour cause… Il y a presque autant de personnes debout dans l’allée que de personnes assises… C’est vraiment malheureux.
17h30. On rejoint donc, bredouilles, les 3 voyageurs qui ont un bilan aussi misérable que nous. Il est 18h, de toute façon, c’est officiel, on n’arrivera pas aujourd’hui à Playa Larga (ce sens de la déduction… De vrais Sherlock Holmes…). Alors nous voila partis chez José les Musclés, “el Moro” de son petit nom, qui s’avère avec sa femme, un couple adorable proposant une chambre impeccable à bon prix. Leur sourire [et la vision du lit…] nous séduit : banco pour cette nuit. Au final d’ailleurs, on a même mangé chez eux une très bonne nourriture et avons beaucoup apprécié leur aimable compagnie, même si, ils restent Cubains tout de même, ils ont vaguement essayé de nous endormir les fruits de la fin de repas mais que voulez-vous, c’est culturel apparemment…
Sur leurs conseils, on se lève donc à 6h du mat ce deuxième matin de voyage pour essayer de chopper le “wa-wa”, comprenez le bus-camion-truc dans lequel on entasse les gens. Accompagnés par Moro, nous nous asseyons donc parmi les travailleurs en partance pour La Havane et… attendons. Une fois n’est pas coutume, il suffit qu’on commence à tendre le pouce pour que GM74 (le nombre de grosses miches à l’air au km2 est en effet ici impressionnant…) se mette à faire de même… Mais de toute façon, ce matin, personne n’a de succès auprès des voitures, grosses miches ou pas, alors, préférant ne pas attendre autant que la veille, nous décidons, sur mimétisme des nombreuses personnes déjà parties et des échos récoltés (“pas de wa-wa aujourd’hui” dit l’un à l’autre), de changer de cap, direction la gare routière. Là, on cherche un taxi… et retombons sur un des voyageurs d’hier! Notre bon plan est trouvé et c’est pour un prix devenu raisonnable que nous faisons route sur La Havane. Ouf!
Sur la route, nous sommes impressionnés par le nombre de personnes qui attendent, profitant de l’ombre d’un pont (50 personnes environ par pont…) ou carrément le long de la route avec ou sans parapluie pour lutter contre le soleil, tendant le bras, parfois avec un billet de pesos cubains. C’est tout simplement attristant. Peut-être qu’aujourd’hui il n’y a pas de wa-wa. Peut-être (sans doute même) que les transports pour les Cubains ne fournissent jamais d’horaires de passage, obligeant la population à attendre aux arrêts pendant une durée parfois interminable le passage dudit transport. Mais ce qui est sûr, au vu de l’entassement des gens dans les camions-benne (franchement, ça fait vraiment camion à bestiaux…) ou dans les bus, et au vu du nombre de gens à attendre perpétuellement sur le bord de la route,


c’est que Cuba à un gros problème de transport, caractérisé au moins par le manque cruel de bus et de wa-wa. Nous plaignons ces gens qui, s’ils ont l’incroyable chance d’avoir tous accès à une santé totalement gratuite (se payant le luxe d‘aller au bout de leurs idées puisque Cuba forme tous les ans des milliers de médecins de pays pauvres et en envoie 30 000 chaque année dans les pays sous-développés au nom de la solidarité internationale… Chapeau), à l’éducation et à l’alphabétisation (c’est quand même ici qu’il y a le taux d’analphabétisme le plus bas au monde…), il n’en reste pas moins qu’ils ont un service de transport publique rendant laborieux le moindre déplacement…
Pour notre part, nous faisons route dans notre bagnole clinquante… Il faut dire ici que les voitures à Cuba, c’est une institution… Vieilles bagnoles américaines des années 50-60 de l’époque de la richesse pré-révolution de Cuba, vieilles Lada Russes de l’époque des accords du bloc soviétique, toutes ces épaves ont traversé les âges du fait du blocus, faisant des Cubains de véritables génies de la mécanique. Fidel les a même déclarées patrimoine national interdisant leur exportation! Résultat?


Des bagnoles à la carrosserie lustrée avec amour et aux banquettes arrière soignées, une ambiance de vieux film américain, la classe internationale d’être à l’intérieur, et une mécanique… presque impeccable… De toute façon, à mi-chemin sur l’autoroute, on avait tous un peu envie de nous arrêter, non?!
Nous finissons par arriver à La Havane vers 11h, tout contents d’avoir toute la journée devant nous pour trouver une correspondance. Enfin c’est ce qu’on croyait! Les bus? Que celui pour touristes évidemment, et c’est que le matin… Les voitures particulières? Combien José? 100$? Et ta sœur? Sauf qu’on a beau penser à toutes les possibilités, il faut bien se rendre à l’évidence : on l’a … au fond à gauche… Tels des poissons dans l’eau… de la marmite, on fait quelques soubresauts d’essais dans la gare avant de nous laisser déporter sur le bord de la route pour rejoindre une guest à proximité de la gare. Oui, c’est que les guests avoisinantes sont à presque 3 fois le prix habituel donc il nous faut prendre un taxi pour trouver un prix plus raisonnable. Et qui dit prendre un taxi dit… attendre sur le bord de la route qu’il y en ait un qui daigne s’arrêter. Et hop! Rebelote… Franchement, c’est pas comme si on était partis hier matin pour faire 145 bornes et qu’on n’avait pas choisi de notre plein gré de dormir à La Havane. (…) Ah si! Un peu à bout, je le reconnais, je retourne voir les chauffeurs de voitures particulières qui m’avaient annoncé les 100$ de tout à l’heure et les écoute prononcer avec attention les paroles énervantes : “5 CUC”. Mais merde. Je retourne vers Matthieu, toujours broucouille sur le bord du trottoir, et puis je fais demi-tour. Ce sera 4 CUC mon pote. Ok ok. “et pourquoi pas 5?!” qu’il tente, “mon pote”, sur un air d’on sait jamais, sur un malentendu. Qu’est-ce qu’il a pas pris… Entre les “De tous les pays qu’on a visités, les Cubains sont les gens les plus capitalistes qu’on ait rencontrés parce que le capitalisme, c’est chercher à avoir toujours plus d’argent et que c’est ce que font tous les Cubains avec les touristes” et les “Depuis 10 jours qu’on est là, on n’a rencontré que 2 Cubains vraiment aimables et désintéressés”, ils ont vraiment pris cher, au point de nous rappeler notre départ excédés de la Syrie…
Aller, c’est pas grave, après un jour et une nuit perdus à La Havane, nous partons le 3eme jour de transport avec un bus Viazul payé 13 CUC par personne, clim à bloc et entourés de touristes, direction Playa Larga. Que voulez-vous, c’est malheureux mais Cuba n’est pas un pays de routards et, si nous trouvons que le tourisme de masse à grand renfort de packages formule tout compris est une forme de gâchis, le touriste à la bouée canard autour du cou ne perd pas grand-chose ici puisque les transports publics, en plus d’être inaccessibles, ne donnent accès à aucune communication intéressante avec la population locale. Quant aux tenanciers des casas particulares, hôtels et restaurants, leur gentillesse n’est souvent dictée que par leur attrait du gain, ce que nous appellerons, en d’autres termes, des relations intéressées. Seules quelques exceptions viennent confirmer la règle. Alors à quoi bon?
Playa Larga, samedi, midi, fin du trajet…

mardi 9 juin 2009

Vinales

Après un transport habilement réussi depuis La Habana, nous arrivons jusqu’à Pinar Del Rio, petite ville de transition, où nous irons dormir, faute de pouvoir trouver un bus pour faire les 25 km restant jusqu’à Vinales, car il et déjà trop tard le dernier de 4h vient de partir... Nous irons donc dormir encore une fois dans une “Casa particular” de toute beauté. Interpelés par le fils, nous irons dans cette maison, qui, bien que pas neuve, à l’avantage d’avoir de hauts plafonds, de grandes pièces carrelées, offrant de jolis volumes et qui s’ouvre sur un petit patio bien frais, au milieu duquel se trouve un petit jacuzzi… vide!! Déception du public! En effet, ici l’entretien des demeures, comme leur aménagement, n’est pas souvent fait à 100%. Mais peu importe, nous profitons du lieu pour une soirée, entre 2 sorties dans la ville pour manger et voir si une sortie est possible. Mais visiblement, la soirée est dans la rue principale et ressemble à une attente générale avec des files d’attente pour prendre des cornets de glace. Nous allons donc nous coucher après quelques Refrescos bien mérités.
Le lendemain, après un bref passage à internet (record à 5 euros de l’heure pour les amateurs!) nous décidons de continuer notre trajet routard à la rencontre des Cubains. Nous sortirons donc de la ville sur les premiers kilomètres dans une calèche tirée par un cheval, au milieu de la circulation. A noter, dans ce moment terrible pour le cheval subissant : les sifflements du cocher, la pollution des voitures et le poids de 14 personnes, le tout au galop, à noter donc la solidarité de Aude, qui s’étonne de voir l’animal effectuer son labeur. Enfin tu crois qu’elle serait descendue pour l’aider? Pas du tout, elle m’encourage même à manger une double ration de pizza au cas où ce serait trop facile pour la pauvre bête! Au bout d’une petite demi heure, nous sommes donc déposés au “terminus”, au milieu de la route, sous un superbe soleil. Le long de la route, nous profitons du paysage de campagne, des panneaux très présents de propagande de la Révolution cubaine qui fête cette année ses 50 ans, aux slogans patriotiques et souvent avec le visage du Che et de Fidel. Nous marchons un peu avant de nous poser sous un arbre et initier une tentative de stop. Nous réussirons à nous faire emmener dans la seule 206 de tout Cuba, non sans avoir attendu presque pendant 2 heures, nous permettant de retrouver un peu de bronzage. A l’arrivée, nous faisons confiance au guide du routard et dénichons une magnifique petite cabane, avec une superbe vue sur les champs, la montagne et les animaux partout autour de nous. Nous sommes à 3 minutes du centre ville, mais profitons d’un cadre unique dans une coquette maison... L’occasion de déguster un petit jus de mangue frais, en se prélassant dans une chaise à bascule, qui est ici l’accessoire obligatoire de toute terrasse. C’est dans ce petit havre de paix que nous allons nous poser, comme prévu pour nous reposer et profiter de ce mode de vie un peu à la campagne.

Notre hôte, Manzana, est très attentionnée et nous renseigne sur ce que l’on peut faire dans la région, balade à cheval, balade à pied, visite de la fabrique de séchage du tabac. Mais nous allons surtout nous reposer et profiter de la chaise à bascule de la terrasse, le lendemain, avec sieste l‘après-midi.

Le soir nous retrouvons le plaisir de pouvoir profiter de la pluie tropicale, de cette chaleur moite, de l’odeur du terrain chaud qui se gorge d’eau pour avoir de la fraîcheur en soirée. C’est aussi l’occasion pour nous de déguster une première fois de la langouste cubaine préparée en sauce, quel régal!! Du coup on refera la même le lendemain soir… Il faut savoir qu’ici la langouste comme le bœuf ne se mangent qu’au restaurant, la consommation étant interdite à titre privé pour les Cubains…
Sur les 2 jours suivants nous allons nous promener dans les environs.

Le premier jour, nous partons en direction de la montagne, en passant par les champs d’ananas, de café, pouvant croiser quelques pieds de tabac en petit nombre, car la récolte c’est terminée fin avril (le tabac n’aime pas l’eau nous expliquera un petit producteur). Durant notre marche, on pourra observer quelques gros lézards et nous faire survoler par de grands rapaces très présents dans la région visiblement. Car c’est un véritable ballet dans les airs, avec des ombres qui croisent notre sentier perpétuellement, à croire qu’ils attendaient qu’on s’écroule de soif….! Nous irons donc visiter la caverne de “la tête de vache”, parcourue à pied, qui ressemble effectivement avec beaucoup mais alors beaucoup, beaucoup d’imagination à…. Bah autant à une tête de vache qu’à un cul de poule, à croire qu’ici aussi, ils ont mâché de la coca! Le paysage de campagne nous transporte presque dans le temps tant ici tout se fait avec les outils, les animaux et la force de travail. Les bœufs retournent la terre, accompagnés des cris et injonctions des paysans. Après cette petite balade et une sieste plus tard, je repars seul pour un petit footing, à défaut d’avoir été invité à une partie de football, ce malgré ma sollicitation. Le soleil se couche doucement et les montagnes offrent de jolies ombres et couleurs tout le long de la chaîne appelée “les organes“, on ne saura pas pourquoi d‘ailleurs. Ce qui est sûr, c’est que ces montagnes nous rappellent les dômes de la Baie d’Halong et de Ban Ha au Laos, dans un paysage complètement vert et calme. En chemin, je croise un de ces enfants fier d’avoir trouvé un joli serpent et le tenant au bout d’un bâton aussi triomphant que méfiant vis-à-vis de l’animal. Au retour, il aura définitivement triomphé puisqu’il sera en train de faire un massacre à grands coups de bâton sur le reptile, du coup visiblement moins effrayant. Sur la route, je pense avoir croisé à peu près tous les moyens de locomotion terrestres possibles, de ceux tirés par des animaux aux véhicules motorisés de tous types (dédicace spéciale aux Ladas Tunnées…).
Pour le lendemain nous choisirons de louer des vélos pour aller jusqu’à un rio visiblement “muy Bonito” et potentiellement où l’on peut se baigner! Avec nos réserves en eau, nous prenons la direction de la “Cueva del indio“, plus grande grotte de Cuba et qui a la particularité de se visiter en partie en bateau. Effectivement la grotte est jolie, aménagée avec de beaux éclairages, jusqu’à une rivière souterraine, qui en amont est une cascade. Petit trajet sympa si ce n’est le bruit du moteur pour faire les 150 mètres de cave…

A la sortie, on craquera un peu les achats : parce qui si on peut remplir un colis de plus, on le fait! On continue notre route dans la campagne, toujours au milieu de champs d’ananas, de manguiers aux branches qui plient sous le poids des énormes fruits approchant la livre! Une fois le pont trouvé, après moult prises de renseignements, nous descendons le long de la rivière qui malheureusement est, comme on le pressentait, un peu boueuse. Pas grave, on profite de l’endroit pour “Faire un peu de salessa!” (à prononcer avec l’accent du sud), l’occasion de trouver le petit pas que nous réaliserons au pays de la salsa, de notre création! (comme dirait l’autre: “c’est en faisant n’importe quoi, que l’on invente n’importe quelle passe!”). Après cet interlude, nous prenons le chemin du retour, après un demi-tour d’ailleurs, “genre je connais le coin mais pas totalement”. Les maisons ici sont parfois sous tôles, parfois à l’ancienne en toit de palme et de forme pointue.

Mais après nos 3-4 bonnes heures de vélo, Aude a besoin d’un peu d’énergie (et malgré ce que les mauvaises langues diront, je ne parle pas de rhum, mais de sucre. Après effectivement, les 2 ne sont pas incompatibles). On s’arrête donc chez des gens, afin de leur demander un petit remontant. C’est avec une infinie gentillesse qu’ils nous inviteront à venir nous assoir chez eux pendant que le chef de famille prépare un ananas. Encore une fois, un arrêt improvisé nous comble de joie dans un échange simple, non mercantile ; enfin un vrai contact avec les Cubains! Après nous être régalés, nous les remercions mais ils en rajouteront une couche, en me demandant si j’ai de la place dans le sac pour nous offrir un ananas à emporter! Quelle gentillesse! Nous aurons un petit cadeau à leur donner comme on essaie de le faire dès que l’on peut. Nous rentrons tranquillement jusqu’à Vinales, où une petite sieste nous attend avant de faire un dernier repas dans ce coin perdu…. Perdu pas pour tout le monde, car quelle surprise en revenant de la cena dans notre chambre, d’avoir la visite d’une superbe tarentule à coté de laquelle je suis passé de nuit sans la voir. Aude, elle, l’aura bien remarquée, sans en être vraiment effrayée, car finalement, une araignée de la taille d‘une main au pied du lit, c‘est normal…. Cela n‘empêchera pas une fin tragique… Bim! Une claquette dans ta gueule!
Seul petit problème ici comme depuis le début ici, la note finale amenée par notre très serviable maitresse de maison Manzana... En effet, toutes ces propositions nous sont apparues finalement très intéressées, puisque le moindre bout de fruit consommé nous a été facturé... Certes, il s’agit d’un logement chez l’habitant, mais par sa gentillesse elle nous a proposé beaucoup de choses (“Vous prendrez bien quand même un fruit?…“), ce qui avait surtout pour but de nous faire dépenser de l’argent chez elle. Nous nous sommes méfiés, mais pas suffisamment pour finalement partir un peu déçus par une relation de sympathie qui nous est alors apparue que dans le but de nous faire “cracher de la tune“, comme c‘est écrit dans certains guides. En effet, elle nous a proposés, avec le sourire mais aussi insistance, beaucoup de choses gentiment tout en nous faisant remarquer très souvent que tel touriste leur avait acheté un cheval, ou tel cadeau offert par un autre, comme l’ordinateur qu’un autre touriste doit leur envoyer avec un téléphone portable… Du coup, nous nous posons un peu la question de la gentillesse des Cubains qui, dans un pays à étiquette communiste, sont les meilleurs capitalistes et semblent profiter des gens, avec une petite fourberie de bonne guerre sans doute. Même si cela me semble normal qu’il y ait des prix touristes et des prix pour les locaux, le différentiel est énorme lorsque les locaux nous font payer le prix multiplié par 50, le tout avec une argumentation fallacieuse, renforçant l’aspect profiteur plus qu’un réel besoin vital d’argent, même si leurs conditions ne sont pas toujours évidentes. Car l’éducation, l’accès au soin sont gratuits, chaque personne a un logement et il y a un minimum de nourriture “offerte” à toute personne, minimisant des conditions de vie difficile.
Si la gentillesse a un prix, à Cuba c’est celui de la vraie relation dès que l‘on touche au tourisme et c’est bien dommage.

mardi 2 juin 2009

La Havana

Après une attente à l’aéroport de Sao Paulo, on attrape notre avion pour Cuba, dernière grande destination de notre voyage. A l’arrivée, le ton est donné : chaleur, palmiers, salsa, mer azurée et visages métissés. Un taxi plus tard, on débarque alors dans une casa particulare, chez David et Lydia, lui parlant couramment le français et dont le père a combattu au cotés du Che. Ils sont d’une grande gentillesse, et malgré des travaux dans la maison on prendra le temps de s’y poser quelques jours. Dès le début on comprend qu’il ne faut pas faire confiance aux Cubains pour éviter problèmes et arnaques nous dit David, ne pas se promener le soir avec un sac, chose que l’on nous conseillera plusieurs fois. Nous sommes dans le vieux Havane, où les maisons sont toutes de vieilles maisons coloniales, aux colonnes, avec des peintures écaillées par le temps, dont chaque fenêtre est protégée par une grille. Mais c’est de ces mêmes fenêtres que s’échappe la musique qui inonde les rues : on y trouve aussi bien de la rumba, de la salsa que du reggaeton et de l’électro.
En se baladant dans les rues, on peut voir directement chez les gens qui laissent les portes ouvertes, afin de laisser rentrer un peu d’air mais visiblement aussi de par l’étroitesse de chaque habitation. Ainsi, chacun partage sa vie privée avec gens dans la rue,

les fenêtres ouvertes sur des moments de partage de vie. Certaines familles profitent de leur habitation au rez-de-chaussée pour faire du petit commerce de refresco (sirop à l’eau) et autres hamburguesa ou plat à emporter, un vrai bonheur pour se rafraichir d’un petit jus sous la chaleur tropicale retrouvée, avec le petit plus de l’ambiance cubaine. Ici c’est encore mieux qu’un film des années 50 ou ce que l’on voit à la télé sur cette île révolutionnaire : c’est le défilé des voitures complètement hors du temps entre Cadillac classées, vieilles Doge et Chevrolet de 5 mètres de long, parfois un peu brinquebalantes ou ayant l’air totalement neuves, elles gardent toutes un sacré cachet (en plus des gaz et de l’huile-carburant).

Et évidement il y a les grandes rivales de ces bijoux roulants, venant de chez l’oncle Sam : les Ladas de l’URSS. Toutes identiques? Non, il y en a des «tunnées»!! Et la c’est la grosse classe, dommage on a pas de preuve à vous donner…
La Havane ce sont toutes ces maisons coloniales de la grande époque des années 50 où la mafia américano-juive régnait, faisant de ce paradis naturel un bordel géant avec plus de 250 bordels répertoriés. Depuis la révolution il ne reste que les maisons, car tous les grands de l’époque ce sont fait mettre dehors, laissant l’ensemble de leurs biens au petit peuple. Dans ce qui fut des grandes maisons familiales, on trouve donc aujourd’hui plusieurs familles dans des maisons fractionnées.

Ces maisons sont pour une petite part en cours en réfection, en partie financée par l’UNESCO. Il arrive alors de se retrouver sur des places où tous les bâtiments sont comme neufs.

Et les autres maisons non rénovées n’en restent pas moins superbes, le vieillissement ajoutant une touche surréaliste dans une ambiance qui l’est tout autant.


Cuba a été la première île découverte par Colomb et est devenu rapidement «la place», relais du commerce mondiale triangulaire. Il en reste un fort près du port de La Havane, qui abrite quelques maquettes de bateau mais également de l’argent pur, ainsi que des gros fragments d’autres métaux purs ; il y en a pour une vrai fortune.
Mais à La Havane, comme dans le reste de Cuba, ce sont également les Cubains et leur recherche éperdue pour soutirer quelques devises étrangères, parfois dans de grandes proportions aux touristes soit crédules soit fortunés. Malgré des prix affichés, ils se proposent de rendre des services avec un prix pour touristes, chose normale, mais qui souvent devient totalement disproportionnée, nous poussant à nous demander ce qu’il pensent du touriste. Clairement : c’est une vache à lait et les Cubains sont capables de faire payer un prix multiplié par 50, préférant refuser une course ou une vente si le touriste se montre retissant.
La Havane, c’est une superbe ville pour se balader et se perdre dans ses rues, où les enfants improvisent une partie de baseball avec un bout de bois et un bouchon de bouteille. Et quelle habilité! Pas étonnant que les Cubains soient champions du monde (24 titres sur 48 disputes!)!